la pyramide et la grenouille
sculptures, faux vitraux
Plastique, anneaux, bois, plot en plâtre, fausse fourrure.
Environ 3m x 2m chacun
Cet ensemble de deux vitraux ont été réalisés dans le cadre d'une résidence avec Les arts en balades, dans la Chapelle des Carmes à Clermont-Ferrand.
Assistance technique : Robin Tornambe, Manue Bureau, le Fablab Sigmake.
Les "vitraux" étaient présentés avec le conte ci-dessous.
***
La pyramide et la grenouille,
ça aurait aussi très bien pu s’appeler
le cerf et la colonne,
le scorpion et l’étoile,
la lune et la clef
ou encore la bâche et la fleur.
Bref, tout ça n’a pas grande importance.
Mais la bâche et la fleur, c’est quand même pas mal, je regrette tout à coup.
« Elle allait oublier sa clef, mais heureusement y pensa au bon moment. Clac.
Elle avait marché pendant des heures ou sinon des jours, sur une grande plaine aux herbes hautes. C’était la saison des moissons pourtant rien n’avait été commencé. Des familles de criquets chantaient la B.O. Elle regarda sa montre, mais elle n’affichait pas l’heure, il y avait une photo d’un chien qui était scotchée dessus, découpée en losange.
Elle arriva à une intersection entre une petite route et une grande route, il y avait aussi un pommier sans pommes. Une pancarte double indiquait à droite la ville, à gauche la campagne. Elle décida de grimper à l’arbre. L’écorce était tendre et ses griffes n’avaient pas de mal à se planter. Une mouche la regardait du coin de l’œil. Au sommet, elle vit une ruine, sinon rien d’autre, juste un trait pour l’horizon, un ciel rose et une herbe jaune. Grimper à l’arbre lui permit de voir qu’il y avait un autre chemin possible, sans nom et sans pancarte. Bien sûr qu’elle le prit. Une grenouille passa et elle la salua de la tête.
Son chemin se poursuivit jusqu’à un village. Elle le traversa, mais ne croisa personne, ou sinon personne ne la croisa. Il commençait à pleuvoir. Dans ce village, on avait déjà vu toutes les maisons : c’était la même qui avait été copiée/collée. Dans son sac il avait une lampe, des cerises, sa mémoire et sa clef qui pesait une tonne dix. Au bout de la dernière rue, elle croisa un cerf qui léchait le ciel, il faisait mine de rien mais elle l’avait bien vu. Elle poursuivit son chemin.
Sortie du village elle commença à descendre une route en zigzag qui contournait des arbres et des bosses. Idéal pour faire du quad aurait pensé une autre personne qu’elle n’était pas. Plusieurs colonnes qu’on aurait essorées ponctuaient le paysage, comme ! des points d’exclamation qui auraient été ! au ! milieu d’une phrase, sans sens précis, ni ! contexte. (Tressaut de voix). Au détour d’un virage en épingle à nourrice, il y avait un petit potager de fleurs métalliques. Elle en cueillit quelque-unes pour se faire deux bâtons de marche.
La pluie qui avait cessé, était retenue par la nuit : comme une immense bâche rouge sous les nuages qui recueillait l’eau. Derrière un arbre en forme de plumeau, elle vit une pyramide. Toutes les fenêtres étaient éclairées et elle voyait d’ici que c’était du triple vitrage. Il y avait un pont-levis, mais pas d’eau dans les douves, comme il s’était arrêté de pleuvoir. Elle toqua à la porte comme on toque dans un film. Et là, champ-contre champ. Un tout petit mulot lui ouvrit la grosse porte en bois. (D’ailleurs personne ne sait comment il faisait ça.) Il semblait sorti de sa sieste et avait les oreilles mises n’importe comment. Il avait des boucles en forme de croissant de lune et un écusson brodé sur sa ceinture. C’était un trèfle à deux feuilles. Il l’invita à rentrer dans son terrier et discutèrent un moment, je ne sais pas du tout de quoi, mais certainement pas des places de parking. Elle continua sa route le lendemain.
Elle avait pris goût à la marche et amorça avec volonté une première dune. Ses sabots glissaient dans le sable mais il était si doux qu’elle profitait de ce massage. Les nuages comme des cotons démaquillants imbibés pleuraient une petite brume. Ça lui piquait un peu les yeux. Un violent coup de vent fit claquer une porte mal fermée. Elle entra. A l’intérieur de la Chapelle, il y avait un suricate et un scorpion qui jouaient aux fléchettes. Le suricate était visiblement en train de perdre, super énervé. Elle poursuivit son chemin, mai dû faire demi-tour, car elle avait oublié sa clef.
À la fin du désert, un chameau dormait à l’ombre de sa bosse. Elle décida de se reposer elle aussi.»