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le rideau bouge encore ~ solo show

exposition personnelle, curatrice Leila Couradin
peintures, sculptures, objets, mobilier, installation, décor, costumes, performance, film d'animation

Texte de Leïla Couradin, curatrice

"Artiste et chorégraphe, Jeanne Chopy passe d’un médium à l’autre pour déployer un vocabulaire singulier à la frontière entre les arts visuels, les arts vivants et le design. Sa nouvelle installation produite pour le Polaris est troublante : elle renverse les espaces pour proposer un décor quasi théâtral dans la salle adossée au public, dédiée aux expositions. Aussi, un ensemble de meubles étranges en bois, vitraux et frites de piscine nous plonge dans un univers rappelant certains films de Jacques Tati ou de Michel Gondry. Si l’on croit reconnaître un kiosque ou un banc, impossible de passer dessous ou de s’assoir dessus : la fonction de ces objets, comme les assemblages surréalistes, reste indéterminée. C’est « beau comme la rencontre fortuite sur une table de dissection d'une machine à coudre et d'un parapluie » disait le comte de Lautréamont. Ces objets insolites font davantage office de socles, recouverts de diverses matières, pour présenter une collection tout aussi déroutante. Ici encore, les quelques objets de la vie quotidienne se sont métamorphosés, si bien que l’on voudrait croquer dans une éponge devenue gâteau. Jeanne Chopy collectionne les tissus et similis cuirs, les perles et sequins, les scoubidous et autres matériaux issus de loisirs « créatifs », pour transformer les objets, les faire passer du placard sous l’évier aux planches d’un cabaret. Créer donc, imaginer, inventer d’autres fictions possibles à partir d’une seule réalité.
Le rideau bouge encore ~... Les quelques costumes suspendus et les chaussures abandonnées sur l‘estrade semblent indiquer que les protagonistes viennent de quitter la scène (la pièce chorégraphique Sottocoppa a été interprétée par quatre danseurs et danseuses le soir du vernissage, au milieu des architectures mobiles). Serait-ce le premier indice d’une enquête à résoudre ? À leur tour le couteau, les bottes de pluie, le gant de toilette, les jardinières et les boules à neige apparaissent et disparaissent dans cet intérieur mystérieux ; la télévision, elle même costumée, est devenue un personnage de plus dans ce soap-opéra.
Les yeux bien ouverts, comme pour ne pas perdre une miette d’un tour de magie, il faudra remettre l’intrigue dans l’ordre et distinguer le vrai du faux. Ou peut-être accepter avec bonheur de se laisser piéger, comme après la sonnerie du réveil, où l’on replonge volontiers dans un rêve sans queue ni tête. Est-ce le moment tant attendu pour incarner notre propre rôle, dans un épisode de Strip tease, une soucoupe volante au-dessus de nos têtes ?

Si toutes ces allégations ne sont les fruits que de mon imaginaire, libre à vous de poursuivre ce cadavre exquis, de passer du coq-à-l’âne, de vous laisser emporter par le fleuve bouillonnant et irrationnel de l’imaginaire. Comme dirait le compositeur Erik Sati « Bien que nos renseignements soient faux, nous ne les garantissons pas."

Texte de Jeanne Chopy

" Samedi 16 septembre, 17:33, température 24°

J’essaie de raconter mon travail à Leïla Couradin, je lui ai promis ce texte (qu’elle ne m’avait pourtant pas demandé) et maintenant que je sais qu’elle l’attend, je m’aperçois que la tâche n’est pas si simple. Je crois que je l’ai fait exprès finalement, pour me forcer à regarder, à écrire, ce que je n’arrive pas encore à voir.
Mon travail est à plusieurs endroits à la fois et n’a pas vraiment de limites de formes, de matières, multi-médiums, intégrant toutes les ressources plastiques potentielles ; il peut aller dans plusieurs directions s’il y en a besoin. Mon travail, je le vois un peu comme quelqu’un, avec un caractère, des émotions et des sentiments. Parfois je lui cours après, parfois, c’est l’inverse, mais souvent, je le cherche.
Dans mon travail, les registres d'images et de matières se recoupent. Les objets, les lieux sont comme piochés et assemblés au hasard, formant un ensemble non prémédité, instinctif. Ensuite, les liens se font au gré des matières, couleurs, textures qui se recoupent et s'entrecroisent. Au gré des images que je vais réutiliser comme des motifs. Ce n’est qu’après que j’essaie de comprendre de quoi il s’agissait.
Parfois, les choses grincent un peu, sinon, c'est doux, lisse, ornementé, appétissant. Les lieux représentés sont des souvenirs, des images piochées sur internet, des inventions (peu situés dans le temps et l'espace) mais tout est pourtant sur une même ligne.

Il y a une ambiance, un climat que j’essaie de mettre en tension : il est question de mise en scène, où les corps ne sont plus là, les objets les ont remplacés, ou du moins eux sont (positivement) là.

J’aimerais qu’il y ait du paradoxe.

Plusieurs histoires se sont peut-être entremêlées, je ne sais pas. J'essaie de ramener de l’étrangeté, comme lorsque quelqu'un nous parle des ovnis et aussi de ramener du mystère, comme lorsque quelqu'un nous parle des grottes de l’art pariétal.

C’est comme une enquête, un vieux polar aux coins usés. Quelque chose s’est produit, je ne sais pas quoi, je ne sais pas comment et ni pourquoi et ça me plaît bien. Cela pourrait s’appeler la méthodologie par le doute.

Finalement, je me dis que je nous raconte peut-être une fiction abstraite par des formes et des images figuratives ou concrètes.

Exposition du 12 octobre au 17 novembre 2023
Crédits photos : Lola Fontanié
Le Polaris à Corbas - en partenariat avec la Factatory - galerie Tator

Merci à Robin Tornambe pour l’aide à la réalisation du mobilier bois
Merci à Kamel Makhloufi pour l’aide à la réalisation des vitraux

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